FCFA : L'urgence d'une sortie pour l'AES
Monnaie et souveraineté : un lien indissociable
Il est illusoire de parler de souveraineté économique, de politique industrielle autonome, ou même de modèle de développement alternatif, tant que la politique monétaire des États de l’AES reste dictée depuis Paris, via le Trésor français et la Banque de France.
Le FCFA est aujourd’hui une monnaie sous tutelle, dont :
- la parité fixe avec l’euro empêche toute flexibilité monétaire,
- la centralisation de 50 % des réserves de change limite la capacité d’investissement intérieur,
- la politique monétaire est dictée selon les intérêts de stabilité externe, et non de croissance endogène.
Or, une nation ne peut s’affirmer pleinement si elle ne dispose pas de la maîtrise de sa monnaie.
Une sortie crédible et économiquement réalisable
1. Un potentiel démographique structurant
Le Mali, le Burkina Faso et le Niger représentent plus de 72 millions d’habitants (2024), et pourraient dépasser les 140 millions à l’horizon 2050. Ce marché intérieur important peut soutenir une production locale et des politiques fiscales élargies.
2. Un réservoir de ressources stratégiques
Ces pays regorgent de richesses : uranium, or, fer, pétrole, lithium, manganèse, etc. Cela peut constituer une base de fonds souverain et de réserves monétaires stables.
3. Des chiffres rassurants
Pays | PIB (USD) | Croissance annuelle | Réserves de change |
---|---|---|---|
Mali | ~20 milliards | 4,1 % | 4,3 milliards |
Burkina Faso | ~18 milliards | 3,5 % | 3,8 milliards |
Niger | ~15 milliards | 6,5 % | 2,7 milliards |
Des pistes crédibles pour une monnaie de rupture
Parmi les scénarios crédibles :
- Créer une monnaie régionale AES arrimée à un panier de matières premières.
- Mettre en place un système de paiement intra-régional (type BRICS Pay).
- Émettre une monnaie numérique souveraine pour faciliter les échanges et limiter l’économie informelle.
Les obstacles : des forces puissantes à l’œuvre
La sortie du FCFA sera combative. Voici les obstacles à anticiper :
- Chantage économique : suspension des aides, isolement diplomatique.
- Instabilité sécuritaire alimentée par des groupes liés à l’Occident ou à ses alliés.
- Guerre médiatique : décrédibilisation des projets souverains par les médias dominants.
- Blocage régional via la CEDEAO alignée sur les intérêts français.
Conclusion : Reprendre la main ou rester dépendant
La question du franc CFA n’est pas technique. Elle est politique. Les États de l’AES doivent poser un acte historique de rupture et bâtir une souveraineté monétaire régionale cohérente, progressive, mais ferme. Ne rien faire serait prolonger l’asservissement monétaire et brider durablement toute ambition de développement souverain.